EN 1945, GENEVIÈVE BOSSU RAPATRIAIT LES PRISONNIERS DE GUERRE PAR AVION
Geneviève Bossu réside à Villevaudé (Seine-et-Marne). Elle a eu 101 ans le 24 novembre et se souvient encore parfaitement des déportés qu’elle a rapatriés d’Allemagne… il y a 75 ans.
Pendant l’été 1945, près de 16 000 prisonniers français ont été ramenés par avion. Ce rapatriement a été le premier et le plus important de l’Histoire et sa réussite est dû au dévouement des équipages : diplomates, médecins et infirmières, en particulier les IPSA (Infirmières pilotes secouristes de l’air).
Pour son frère
Geneviève a 20 ans quand la guerre éclate. Son frère, Roger Albinet (futur maire de Villevaudé, de 1947 à 1971) est prisonnier en Allemagne. Avec un simple diplôme d’infirmière, elle rejoint les IPSA, une section aérienne de la Croix-Rouge française créée en 1934, afin d’aller le chercher.
C’est la raison pour laquelle je voulais récupérer les prisonniers, même si je savais que je ne le retrouverais pas forcément.
Première mission sanitaire
Son départ a lieu en avril 1945. Elle doit ramener les prisonniers du camp de concentration de Buchenwald, rassemblés au Luxembourg.
On les a installés dans le train, sur des brancards. Ils avaient tous une étiquette autour du cou car certains ne parlaient pas. Il y avait beaucoup de Français et j’ai même retrouvé un cousin !
Avec la première armée française Rhin et Danube
Le 8 mai 1945, jour où Berlin capitule, elle accompagne à Mengen la première armée française Rhin et Danube. Celle-ci est commandée par le général de Lattre de Tassigny et elle fait partie du convoi d’ambulances qui la suit. Les ponts sur le Rhin sont détruits et le ravitaillement en essence pour l’armée s’effectue par avion, de Strasbourg à la base de Mengen. Les avions repartant à vide, elle et ses cinq collègues les remplissent à raison de trois rotations par jour. Ce sont ainsi 1935 soldats, dont 560 couchés, qui seront convoyés par une centaine d’avions Junker ou Dakota.
J'ai vu tellement de souffrances qu’aujourd'hui encore, je m'interdis de me plaindre.
Les rescapées de Ravensbrück
En août 1945, elle s’envole pour Malmoë (Suède) afin de rapatrier une centaine de femmes que le comte Bernadotte, diplomate suédois, a réussi à extirper du camp de Ravensbrück, deux mois avant la reddition allemande. Un terrible spectacle s’offre alors à sa vue.
Elles n’étaient plus que squelettes. Notre crainte était que les parents les fassent manger trop. On les a soignées sur place pendant deux mois avant de les ramener en avion.
La jeune convoyeuse se voit ensuite détachée au ministère des colonies pour évacuer des familles et des malades bloqués par les guerres à Madagascar, en Afrique, Inde et Indochine. Peu rapides et volant assez bas, il fallait six jours aller-retour aux avions pour faire Paris-Dakar.
Une vie au service des autres
Fin 1946, elle tombe malade et sa convalescence se déroule dans la demeure familiale, à Villevaudé.
En 1950, elle obtient son diplôme d’infirmière d’État et sera monitrice IPSA, puis hôtesse à Air Maroc. En 1956, elle épouse Henry Bossu, directeur des essais chez Panhard, et devient, jusqu’en 1967, infirmière pour l’OTAN (Organisation du Traité de l’Atlantique Nord).
En 1968, elle travaille dans un laboratoire puis, jusqu’à sa retraite en mai 1981, comme infirmière à la Compagnie générale d’électricité. Après la mort de son époux, en 1995, elle décide de rester à Villevaudé.
Ce que j'ai fait, tout le monde l’aurait fait.
Nommée chevalier de l’ordre national du Mérite par décret du 14 novembre 2003, Geneviève Bossu aura le privilège d’être décorée le 11 mars 2004 par Geneviève de Galard, l’héroïque convoyeuse de l’air de Diên Biên Phu (Indochine), elle-même Grand-croix de la Légion d’honneur.
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