NATHALIE BOURGEOIS
ACTE SUD JUNIOR
Grand ou petit ? Tout est relatif.
Surtout au cinéma où les choses et les personnes sont rarement représentées à leur taille réelle. Quel est donc le point commun entre le Grand Canyon, un génie libéré d’une bouteille, l’œil d’un bébé hippocampe et d’un gorille géant au sommet de l’Empire State Building ? Comment raconter l’histoire d’un homme qui rétrécit ? De Microcosmos à Métropolis, le cinéma a le pouvoir vertigineux de filmer l’infiniment petit, de faire entrer le spectateur dans d’immenses panoramas, de réinventer le monde avec des maquettes, de réunir sur un même écran géants et Lilliputiens.
A peine inventé, le cinéma racontait déjà des histoires extraordinaires en modifiant les dimensions des personnages et des choses.
‘’Les éléphants sont généralement dessinés plus petits que nature, mais une puce toujours plus
grande’’
note judicieusement Jonathan Swift, l’auteur des Voyages de Gulliver. Car il y a toujours plus petit
que le grand et plus petit que le petit.
Et la vraie taille ne correspond pas toujours à celle perçue par l’œil : un grand vu de loin paraît petit
tandis qu’un petit vu de près semble très grand.
C’est similaire au cinéma où les choses et les individus projetés sur un écran ne sont presque jamais représentés en fonction de leur taille réelle. Au spectateur de la deviner ou de la déduire d’après ce qu’il sait déjà et la clef du mystère semble bien être que rien n’est petit ni grand sinon par comparaison. Les histoires extravagantes tournées avec les trucs des magiciens, les effets trompeurs des décors et des maquettes, les trucages mécaniques et optiques, ces films-là n’ont pas fini de nous enchanter. La notion de grand et de petit y cohabitent grâce aux collages et ‘’bricolages’’ que l’on peut repérer facilement si l’on y prête un peu attention. Tous ces trucages, à la technique parfois imparfaite, révèlent finalement quantité d’informations sur les savoir-faire des différentes époques et pays qui les ont conçus puis fabriqués.
Ce petit livre de 72 pages, joliment illustré, révèle ainsi comment le cinéma se joue des proportions et des distances en réinventant la relativité dans des films tels (entre autres) ‘’Godzilla’’ (1954), ‘’Jason et les argonautes’’ (1963), ‘’Métropolis’’ (1927), ‘’L’homme qui rétrécit’’ (1957), ‘’King Kong’’ (1939), etc.
Y sont notamment décrits des procédés comme l’incrustation, la plongée et la contre-plongée, le cache contre cache, la perspective, l’animation image par image, la maquette comme décor, la transparence, le travelling.
L’auteur, Nathalie Bourgeois, dirige le service pédagogique de la Cinémathèque française. Celle-ci s’est associée à l’éditeur Actes Sud Junior pour lancer une nouvelle collection de livres de cinéma pour les enfants et les adolescents, dont cet ouvrage fait partie avec deux autres titres sortis également début octobre 2006 : ‘’Lanternes magiques’’ et ‘’La peur au cinéma’’.
Bien que l’approche soit séduisante et la démarche pédagogique louable, le résultat et le label ‘’Cinémathèque française’’ ne justifient pas selon moi le prix (qui est trop grand) de cet ouvrage destiné à sensibiliser les jeunes lecteurs au décodage de la sémantique cinématographique. Dommage, car il est plus que probable que son coût constituera un grand handicap à la soif d’apprendre des petits.(Serge Moroy)
Grand/petit au cinéma – Nathalie Bourgeois - 72 pages –
– Acte Sud Junior / La Cinémathèque Française –
Dépôt légal : octobre 2006 – ISBN : 2-7427-6309-0 – Prix : 16 €
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