Le comédien Christian Marin s’est éteint mercredi 5 septembre à Paris. Il était âgé de 83 ans. S’il a beaucoup joué au théâtre, ce Lyonnais d’origine a surtout fait le bonheur du cinéma français des 60 et 70 en jouant dans un grand nombre de films boudés par le cénacle des cinéphiles, mais très prisés du grand public. Le public retiendra principalement ses rôles au côté de Louis de Funès dans l’hilarante série des Gendarmes et dans « Les chevaliers du ciel », feuilleton diffusé à la télévision pendant l’âge d’or de l’ORTF (voir ci-dessous) où il campa, avec son air ahuri et sa silhouette dégingandée, l’inénarrable Laverdure du fameux tandem Tanguy et Laverdure. C’est une véritable gueule du cinéma populaire français qui vient de disparaître.
Un tandem télé supersonique
La série « LES CHEVALIERS DU CIEL » constitue l'un des grands feuilletons à succès produits par l'ORTF. Inspirée de la célèbre bande dessinée de Jean-Michel CHARLIER et d'Albert UDERZO qui paraît le 29 octobre 1959 dans le n° 1 de la revue « PILOTE », elle donne la vedette à deux aviateurs de « l'escadrille de chasse des Cigognes », le séduisant lieutenant Michel TANGUY (Jacques SANTI) et son fidèle et inséparable boute-en-train d'ami, le lieutenant Ernest LAVERDURE (Christian MARIN).
Avec leurs traits de caractère tout à fait particuliers et dissemblables, nos deux héros chevaleresques n'auront de cesse de jouer les justiciers sur la terre comme dans le ciel, le tout sans s'embarrasser de scrupules ni jamais compromettre leur indéfectible et virile amitié. Cette dernière est d'ailleurs scellée dans la chanson du générique vigoureusement interprétée par un Johnny HALLYDAY en pleine forme, ce dernier ayant également contribué à populariser la série : « Les chevaliers du ciel, dans un bruit de tonnerre, à deux pas du soleil, vont chercher la lumière. Moitié ange et moitié démon, mauvaises têtes mais gentils garçons, ils ne savent ni le bien ni le mal car ils ne pensent qu'à leur idéal. Et si l'amour vient à passer, c'est l'amitié qui gagne toujours... »
C'est François VILLIERS, le réalisateur de « Hans le marin » (1949) et de « Pierrot la tendresse » (1960), qui sera chargé par l'ORTF de tourner les 39 épisodes d'une durée de 26 minutes chacun (dont les 13 premiers sont filmés en noir et blanc). La plupart des épisodes sont tournés en décor réel sur les bases aériennes de CREIL (dans l'Oise) et de DIJON, ce qui aura pour effet de mobiliser la 10ème escadre de chasse et ses fameux « Mirage 3 ».
Les prises de vues aériennes sont assurées par Guy TABARY. Des tournages au sol ont lieu également sur les base de ISTRES et de CARPIAGNE, dans les Bouches-du-Rhône, et même en Tunisie (base de Bou-Sfer) pour le parfum exotique de certains épisodes. Enfin, les raccords de certaines scènes seront tournées au fort d’Evry, près de PARIS. Pour cette série épique, l’armée de l’Air a mis le paquet : des moyens en matériels mais aussi en hommes sont généreusement mis à la disposition du réalisateur, ce qui rend assez crédibles les intrigues semées au fil des épisodes qui se veulent aussi (et pour cause) apologétiques.
La première diffusion des « CHEVALIERS DU CIEL » a lieu le 16 septembre 1967 et le succès est aussitôt au rendez-vous. Succès tellement fulgurant que la revue « PILOTE » se verra dans l'obligation de demander aux auteurs de modifier les dessins pour qu’ils ressemblent aux héros de la série T.V. !
Mais, Jacques SANTI se lasse très vite de cette popularité envahissante et la série n'est pas poursuivie. Pourtant, des acteurs comme Victor LANOUX et Marlène JOBERT font leur début au cinéma grâce aux exploits héroïques de TANGUY & LAVERDURE. Il faut dire que 1967 est encore une année faste pour le cinéma puisque l'on dénombre pas moins de 211.400.000 spectateurs dans les salles tandis que 7.471.000 téléviseurs trônent dans les foyers français pour cette seule année-là (Source : Téléciné n° 197 - Mars 1975).
Enfin, n'oublions pas que la T.V. couleur ne fera son apparition dans les foyers français qu’en 1971, d'où la légitime surprise de certains spectateurs de découvrir ces épisodes en couleurs, lors de quelques rarissimes rediffusions (Couleurs Pays /A2 / Sept-oct. 1997).
S. Moroy
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