Le seul documentaire de Luis Buñuel
Titre original : Las Hurdes, tierra sin pan
Court-métrage franco-espagnol de Luis Buñuel (1932)
D’après une étude de géographie humaine : Las Jurdes
Directeur de la photographie : Eli Lotar
Collaborateurs : Pierre Unik et Sanchez Ventura
Voix du narrateur : Abel Jacquin
Distributeur : Les films du Jeudi (Paris)
Musique : J. Brahms (IVe symphonie)
Préambule
Cet essai cinématographique de géographie humaine a été tourné en 1932, peu de temps après l’avènement de la République espagnole. De l’avis des géographes et des voyageurs, la contrée que vous allez visiter, appelée « Les Hurdes », est une région stérile et inhospitalière où l’homme est obligé de lutter, heure par heure, pour sa subsistance.
Jusqu’en 1922, année où la première route y fut tracée, « Les Hurdes » était presque inconnue du reste du monde et même des habitants de l’Espagne.
Résumé
Le pays des Hurdes, en plein milieu de la presqu’île ibérique, s’étale sur l’écran avec sa désolation, ses villages infects, ses habitants tous malades et tarés (consanguinité), ses paludéens. Une telle désolation est inconcevable en plein XXe siècle et au sein de l’Europe.
Commentaire
Seul film documentaire de Buñuel tourné en un mois (avril à mai 1932) à La Aberca (Salamanque, Castille-Léon) et Las Hurdes (Extremadure). D’une durée d’à peine 30 minutes, il est sorti en France en 1937. C’est d’ailleurs cette année-là qu’il fut sonorisé puis à nouveau en 1965 lorsque Buñuel décida, avec son producteur Pierre Braunberger, de diffuser une version non censurée du film.
Ce documentaire, d’une âpreté extraordinaire, décrit avec un douloureux lyrisme la détresse profonde d’une région reculée d’Espagne et de ses habitants, particulièrement déshérités par la nature. Un réquisitoire impitoyable de Luis Buñuel, auquel collaborèrent Eli Lotar et Pierre Unik.
Film remarquable par son sujet peu traité à l’époque (la misère en milieu rural), par son montage (fait par Buñuel lui-même) et par l’usage de ses gros plans, il continue, aujourd’hui encore, à surprendre le spectateur. Cela vient du fait que Buñuel a reconstitué certaines scènes du film en les mettant en scène afin de créer une plus forte impression sur le spectateur. Ainsi, une chèvre et un âne ont-ils été notamment tués pour les besoins du film.
« Il n’y a rien de mieux qui tienne en éveil que de penser toujours à la mort » déclame une vieille femme qui parcourt le village, la nuit, en psalmodiant des prières. Certaines scènes particulièrement rudes sur la vie quotidienne des Hurdanos pourront heurter la sensibilité de certains spectateurs : le nourrisson mort dans son petit lit, la fillette malade qui s’est isolée depuis 3 jours et qui va mourir deux jours plus tard faute de soins, les jeunes femmes avec leurs goitres qui ressemblent déjà à de vieilles femmes...
En 1976, Tomas Perez Turrent interroge Luis Buñuel à propos de son documentaire :
- « Avez-vous utilisé un scénario ? ».
- « Non. J’ai visité la région 10 jours avant en emportant un carnet de notes. Je notais : chèvres, fillette malade du paludisme, moustiques anophèles, il n’y a pas de chansons, pas de pain. Et ensuite j’ai filmé en accord avec ces notes. J’ai monté le film sans Moviola, sur une table de cuisine, avec une loupe, et comme je m’y connaissais encore très peu en cinéma, j’ai éliminé de très bonnes images de Lotar parce que les photogrammes étaient flous. Je ne savais pas que le mouvement pouvait d’une certaine manière reconstruire l’image. C’est comme cela que, parce que je n’avais pas de Moviola, j’ai gâché de bonnes prises. […] Dans ce film, rien n’est gratuit. C’est peut-être le film le moins « gratuit » que j’aie fait » (Source : Conversations avec Luis Buñuel, « Il est dangereux de se pencher au-dedans », Cahiers du cinéma, Septembre 1993).
S. Moroy
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Je suis fils et petit fils de hurdano et ce documentaire est exagéré. Certes il n y avait pas de pain tout les jours mais les hurdanos ont toujours sus faire preuves de débrouillardise en ce qui concerne la vie dans ses montagnes... les châtaigner n'ont jamais manquer ainsi que les troupeaux de chèvres et le gibier à toujours été abondant. Chaque famille ont des terrains sur lesquels ils cultivent toute sorte de fruits et légumes. Buñuel, pour son premier film, à voulu interpellé en chocan avec las hurdes mais il aurait pu aller dans certaines régions d Andalousie ou bien de Murcie ou biens la mancha,... malheureusement les paysan español on toujours été délaissé par le gouvernement et cela continue de nos jours.
Rédigé par : Doni | 07 octobre 2024 à 12:44