Les scouts et guides de France, groupes de Meaux et Melun, ont célébré, vendredi 11 novembre, le 80e anniversaire de la croix Péguy qui se dresse à l’angle de l'intersection de la D129 et D27, à Villeroy.
La grande tombe de Villeroy, sur la route de Chauconin-Neufmontiers, où gisent le lieutenant Péguy et ses camarades tués sur le champ de bataille.
C’est en effet le 11 novembre 1936, jour pour jour, que le monument a été érigé grâce à l’initiative de Paul Doncœur. Le prêtre, qui était aumônier militaire lors de la Grande Guerre, a mobilisé son entourage pour financer le monument, requérant l’aide des scouts.
Sur le lieu du départ de l’attaque
Située à l'origine près de la nécropole (ou grande tombe de Villeroy), la croix a ensuite été déplacée en 1988 sur le territoire de Villeroy, à l’endroit même du départ de l’attaque du 5e bataillon du 276e régiment d’infanterie (RI) qui est intervenu pour la première bataille de la Marne.
En haut de la croix Péguy, la petite Espérance qui se penche sur une rose.
En haut de la croix figure une sculpture de la petite Espérance, signée Henri Charlier. Au pied, un poème de Charles Péguy : Heureux sont ceux qui sont morts dans les grandes batailles, couchés dessus le sol à la face de Dieu, heureux ceux qui sont morts pour leur âtre et leur feu, et les pauvres honneurs des maisons paternelles.
Croire en quelque chose
« Il n’y a pas d’imagination sans mémoire et on ne naît pas de rien. On est toujours, quelque part, des héritiers. Aujourd’hui, compagnons, pionniers, caravelles, scouts et guides, vous mettez vos pas dans ceux de vos pères. Et je souhaite que, dans 80 ans, d’autres mettent leurs pas dans les vôtres : dans ce que vous aurez fait, dit ou accompli, dans ce qui aura été vos causes parce qu’il faut que vous ayez des causes, des idéaux. Travaillez à ce qui peut élever l’homme au-dessus de lui-même et soyez des artisans de résurrection et de paix » a déclaré Benoît Vandeputte, aumônier général des scouts et guides de France.
Pèlerinage annuel
Odile Giraud-Péguy s’entretient avec Daniel Clément, membre de l’association Villeroy musée 14-18 et président de la SHCE (Société d’histoire de Claye et ses environs).
Parmi la quarantaine de participants se trouvait Odile Giraud-Péguy. La petite fille de l’écrivain connaît bien les lieux puisqu'elle vient, chaque année, se recueillir sur la tombe de son aïeul. Elle réside à Antony (Hauts-de-Seine), non loin de Bourg-la-Reine où Charles Péguy a habité la dernière année de sa vie. « C'est une cérémonie vraiment très émouvante. Mon père n’a pas connu son père pour la simple raison que lorsque mon grand-père est parti à la guerre, ma grand-mère était enceinte ».
Au patrimoine de l'Unesco
En septembre 2015, la commune avait inauguré le parcours Charles-Péguy (3 km). Un autre événement honorera prochainement le petit village briard. « Un dossier va être déposé en janvier pour inscrire des lieux de mémoire sur la Grande Guerre (96 en France, 45 en Belgique) au patrimoine mondial de l’Unesco. Pour la Seine-et-Marne, c’est la grande tombe de Villeroy qui a été sélectionnée » précise Natalie Mailliard, trésorière de l’association Musée 14-18 de Villeroy.
Un petit musée pour une grande passion
Bruno Beltramelli, prêtre du secteur pastoral d’Esbly, derrière la table d’orientation des lieux de la bataille de la Marne.
Devant la nécropole, Raymond Pezant, historien meldois et spécialiste de la bataille de la Marne, raconte la grande bataille de la Marne aux scouts.
« Le 5 septembre 1914, la bataille de la Marne a commencé à 12 h 30 et a fait 1 400 morts, rien que ce jour-là. Vu le nombre des blessés, le service de santé des armées a vite été débordé. Les premiers soins ont été prodigués dans l'église de Villeroy où les médecins opéraient souvent sur l'autel-même et sans anesthésie. Charles Péguy repose dans la nécropole érigée en 1932, au bord de la route de Chauconin, avec 132 de ses camarades » précise Philippe Braquet.
uelques habitants sont venus rejoindre les scouts pour se recueillir devant la croix.
« Chaque pays à l’époque était patriote, parfois jusqu’au nationalisme. Le nationalisme, c’est la guerre ; la patrie, c’est la fraternité » a déclaré Benoît Vandeputte.
Les scouts ont déposé des chrysanthèmes
Rémy, compagnon scout, a déposé une gerbe de fleurs blanches et vertes, respectivement couleurs de la paix et de l’espérance.
Julien Proffit, conseiller régional Ile-de-France, entre Daniel Froger, maire de Villeroy, et Daniel Clément qui a relaté l’histoire de la croix Péguy.
Âgé de 45 ans, le passionné d’Histoire et président de l’association gère le petit musée ouvert en août 2004. « Chaque Français avait entendu parler de l'effroyable bataille, pour autant il n’y avait rien dans le secteur pour la rappeler. Daniel Froger, maire du village, nous a soutenus, trouvant intéressante l'idée de créer un musée » poursuit-il.
Les hommes du 276e RI étaient des réservistes, âgés de 24 à 35 ans, pour la plupart originaires de la région de Meaux et natifs de Villeroy, Iverny, Claye-Souilly.
On peut voir également un infirmier français soignant un soldat allemand. A droite, la cantine militaire de Charles Péguy.
Au musée 14-18 de Villeroy, un mannequin de Charles Péguy à sa table de travail.
Au rez-de-chaussée est exposée une collection impressionnante d’objets militaires découverts dans les champs alentour par Philippe et son père lors de fouilles. Ce dernier est décédé en 2004, peu avant l'inauguration du musée.
Certains objets, rares, voire uniques, témoignent de la vie des soldats et de l'enfer des tranchées. Au premier étage, c’est la bataille du 5 septembre qui est retracée à l’aide d’une maquette géante mais aussi d’objets personnels. Quelques-uns appartenaient au lieutenant Péguy, sa famille les ayant donnés au musée : képi, épaulettes, cantine.
La fin tragique de Charles Péguy
Bien qu’âgé de 41 ans et dispensé des obligations militaires, Charles Péguy a répondu à l’appel des armes qui a mobilisé huit millions de soldats en France. Il a quitté les siens, déclarant : « Je pars en soldat de la République pour le désarmement général et la dernière des guerres ». Le 2 août 1914, il a été affecté à la 19e compagnie du 276e RI comme lieutenant. Le 5 septembre, à 17 heures, son régiment, au départ de la route d’Iverny-Chauconin, s’est élancé à travers champs. Sa mission était d’enlever les hauteurs de Penchard et Monthyon, tenues par les Allemands, afin de couvrir la retraite de la brigade marocaine. Dès le début de l’assaut, le lieutenant Péguy, à la tête de sa section, a été tué net d’une balle en plein front. S.Moroy
L'entrée du musée Charles-Péguy est gratuite. Il se visite sur rendez-vous
[email protected] – Tél : 01 60 61 03 97.
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