IVAN PEYCHÈS (2 février 1906 - 30 septembre 1978)
Elu le 12 mai 1969 à l’académie des Sciences
Ivan Peychès fait partie de ceux qui ont apporté beaucoup à l’humanité, mais dont le nom et l’essentiel de la vie restent ignorés.
Cet extrait du discours de Monsieur Hely D’ Oissel, PDG de Saint Gobain, lors de la cérémonie de remise de la Croix de la Légion d’honneur en février 1954 en témoigne :
« Il nait en 1906 à Libourne, dans cette Gironde qui lui vaut à la fois ses connaissances sur les vins et sa pointe d’accent.
Ses études secondaires à l’institution Montesquieu sont brillantes et son père, modeste commerçant, sait en tirer conséquence et faire les sacrifices voulus pour lui permettre de poursuivre ses études secondaires à la faculté de Sciences de Bordeaux.
Ces photos m'ont été envoyées par Florent Gaillard, neveu d'Ivan Peychès.
Les certificats de licence classiques s’agrémentent de quelques suppléments, tel que celui d’Astronomie approfondie, qui trahissent sa curiosité d’esprit.
C’est la préparation du concours d’agrégation… et après un an de service militaire dans l’artillerie lourde, il commence une nouvelle thèse à la Sorbonne : Saint-Gobain le remarque et il est nommé chef du Laboratoire d’Essais Thermiques, alors qu’il vient à peine d’obtenir en septembre 1936 un poste au Lycée Pierre Loti à Rochefort.
Mobilisé, il est emmené en captivité à l’Oflag IV D en Silésie pendant un an.
Le 1e janvier 1944, il est directeur des recherches au laboratoire de La Villette
Le laboratoire Saint-Gobain Boulevard de La Villette (1956)
Ses communications l’ont fait connaître dans le monde verrier et dans le monde savant.
SAINT-GOBAIN
Son activité intellectuelle ne s’exerce pas uniquement sur le terrain scientifique : il publie une étude magistrale sur le château fort de Saint Gobain qui témoigne d’une connaissance profonde de l’architecture militaire du XIIIe siècle. »
Notes sur le château-fort de Saint-Gobain. L'influence du château et des premières halles sur l'évolution de la manufacture de saint-Gobain, dont le livret m'a été offert par monsieur Glantzlen de Saint Gobain.
Nous devons à ce professionnel exceptionnellement doué pour trouver, mais aussi pour diriger des équipes de chercheurs (jusqu’à 500 en fin de carrière) une contribution essentielle au développement de la fusion électrique du verre qui lui valut de se retrouver à 38 ans directeurs de recherche des glaceries Saint-Gobain. Par la suite, Ivan Peychès inventa le procédé TEL utilisé aujourd’hui dans le monde entier pour la fabrication industrielle de la laine de verre ; on lui doit le procédé JUSANT qui permit à l’époque de fournir les plus grandes glaces du monde pour la Maison de la radio à Paris ; mais ce sont encore les verres isolants, les verres laser, des verres du four solaire d’ Odeillo, les hublots du Concorde qui sont sortis des usines de la Compagnie Saint Gobain.
Homme d’une grande culture générale animée d’une sensibilité artistique très développée, Ivan Peychès excellait dans de nombreuses occupations de loisirs, celles à caractère manuel en particulier comme la décoration domestique, fresque en mosaïque, salles de bains, le dessin, la peinture, la plume, le maquettisme (de bateaux en particulier), le chemin de fer miniature, l’énergie solaire, la musique ….
Sur la cheminée: on peut lire Montjay ma joie
La maquette de La Réale qui se trouve à la bibliothèque de la Roseraie à Montjay-la-Tour a été acquise par l'association Loisirs Jeunes de Villevaudé.
Le petit salon était occupé par un piano à queue….. Le grenier des Peychès était une véritable caverne aux trésors…
Et en 1965, après avoir construit deux petits orgues électroniques, il s’attaqua à la construction d’un orgue classique de 1108 tuyaux, un instrument dont il savait jouer tout comme son épouse et qui comportait vingt-huit jeux répartis entre trois claviers et le pédalier, les tuyaux de la trompette provenant de l’orgue privé du grand compositeur Tournemire.
Orgue Peychès après sa restauration et sa bénédiction par Mgr Dagens, membre de l'Académie Française. Église de Mansle. Charente. 2003. (Photo Florent Gaillard)
Cet orgue, installé à Montjay-la-Tour, fut transféré en 2003 dans l’église de Mansle en Charente.
Toute la valeur humaine, et peut être même peut-on dire le sens de l'humour du grand directeur de recherches et talentueux humaniste Ivan Peychès est peut-être dans cette anecdote rappelée opportunément dans un des discours de réception à l'Académie des Sciences en 1990:
Un camionneur était dans la cour pour décharger du matériel. Ivan Peychès passe par là et, séduit par le magnifique appareil qui trônait à l'arrière du véhicule, commence à en tourner les boutons. C'est alors que le camionneur, sans ménagement, s'adresse à lui "Dis donc toi, au lieu de bricoler, donne moi un coup de main pour décharger!".
Et alors gentiment sans accuser le coup, "Monsieur le directeur" que ses collaborateurs n'ont jamais appelé ainsi tant il était simple, humain et attentif à chacun, prête la main et collabore au déchargement.
Depuis 1979, l'Académie des Sciences remet chaque année le Prix « Ivan Peychès », présent sur la photo ci-dessus. Ce prix est destiné à « récompenser des travaux portant sur les applications de l'étude des matériaux non métalliques notamment vitreux ou de l'énergie solaire ou, à défaut dans le domaine des Sciences appliquées ». L'école de la commune de Villevaudé au hameau de Montjay-la-Tour (Seine-et-Marne) porte depuis 1992 son nom.
L'école élémentaire accueille 9 classes primaire et maternelle
Ivan et Elena, "Yvel"
C’est dans le train qui les amenait chaque jour de Libourne à Bordeaux pour leurs études supérieures qu’Ivan et Elena firent connaissance. Ivan inventa une sorte de télégraphe Chappe (deux bras de bois articulés dont chaque position correspond à une lettre de l’alphabet) pour communiquer entre eux et par voie aérienne…
Leur mariage eut lieu le 21 septembre 1931, Elena Dubourg était alors institutrice. Tout jeune, Ivan accompagnait ses parents à l’Ile de Ré, rendant visite à un ami. C’est là que le couple acheta en 1933 un terrain pour y construire de leurs mains leur résidence de vacances qu’ils passaient souvent en compagnie de leurs familles.
Royan 1917 (Photo Florent Gaillard)
Après avoir vécu à Paris, le couple acquit en 1948 la maison de Montjay-la-Tour, au 14 rue de la Tour, qui surplombe un grand jardin et d’où on peut apercevoir la Tour Eiffel.
Elena et Ivan dans leur jardin de Montjay-la-Tour (Photo Françoise Sanders)
A propos de son couple, Ivan Peychès lui-même déclara lors de sa réception à l’Académie des Sciences le 10 janvier 1970 : « Depuis que nous nous sommes révélé des goûts communs ou complémentaires, nous avons tout partagé, joies et peines, dans la plus absolue confiance.
Nous nous sommes bâti notre monde avec un peu d’égoïsme, et c’est sans doute une autre tare à porter à mon débit, mais cette fois elle est partagée et nous en sommes fiers. Nous vivons à deux dans une vie dominée par une orgueilleuse devise, forgée par nous et pour notre usage exclusif. Elle figure sur mon épée, sous forme ésotérique... N’en demandez pas le sens… Elle fait partie de notre monde secret. »
Et c’est à propos de cette union particulièrement étroite avec son épouse que, lors de ce discours de réception à l’Académie des Sciences, a été évoquée une phrase de Saint Augustin qui, traduite signifie : « Pour celle qui aime, il n’y a pas de peine ; et s’il y a peine, c’est une peine qu’elle aime »
Tous deux possédaient une bague à chaton contenant un poison en cas de déchéance physique.
Le 30 septembre 1978, nous apprenions le décès brutal d’Ivan Peychès, suite à une seconde crise cardiaque.
C’est le 20 novembre 1992 au matin, six semaines après l’inauguration de l’école Ivan Peychès qu’Elena fut trouvée morte dans sa cuisine par Lucienne Véron, sa voisine et dame de compagnie. Je l'avais quittée la veille, lors de ma visite bi-hebdomaire... souvent à l'heure de l'apéritif devant un petit "martini gin" ...
Attendant l’arrivée de la famille arrivée au petit matin du 21, nous sommes restés auprès d’elle, sereine, paraissant dormir sur le canapé du salon. Nous, ses amis fidèles, très affectés par sa disparition, n’avons pu nous résoudre à la laisser seule dans sa grande maison de Montjay la Tour.
Elle repose au cimetière de la Couarde-sur-Mer à côté de son époux avec qui elle avait constitué un couple vivant une union « spirituelle » toute particulière, au point que dès 1935, toutes les lettres de l’un ou de l’autre à des tiers familiers furent signées « Ivel ».
Yvette Frassati-Godefroy
Je remercie Florent Gaillard, neveu d'Ivan Peychès, Madame Sanders et ses filles, Villevaudé, proches d'Elena, Georges Licini de m'avoir permis de publier leurs photos, et monsieur Glantzlen pour ses recherches.
Compliments pour cette publication et cette riche documentation ....
cordialement
Claude PETIT
Rédigé par : C.PETIT | 06 décembre 2017 à 08:48
Merci Beaucoup pour Votre Travail , Bien cordialement
Rédigé par : Le Rouzic Jean-Yves | 06 juillet 2018 à 15:27
Le 30 septembre 1978, nous apprenions le décès brutal d’Ivan Peychès, suite à une seconde crise cardiaque.
C’est le 20 novembre 1992 au matin, six semaines après l’inauguration de l’école Ivan Peychès qu’Elena fut trouvée morte dans sa cuisine par Lucienne Véron, sa voisine et dame de compagnie. Je l'avais quittée la veille, lors de ma visite bi-hebdomaire... souvent à l'heure de l'apéritif devant un petit "martini gin" ... Y Frassati-Godefroy
Rédigé par : YGodefroy | 22 février 2023 à 14:40