Au gymnase de la Dhuy de Courtry, quelques savateurs, nom des pratiquants de BFS (Boxe française-savate), s’entraînent. Parmi eux, Emma Vartanian, 14 ans. Avec ses 1 m 62 et ses 55 kilos, ce joli petit brin de fille est vice-championne de France 2013.
Emma s’accorde une pause. Elle enlève ses gants, range une mèche rebelle de cheveux blonds. « Petite, j’accompagnais mon père qui faisait de la boxe dans sa salle à Noisy-le-Grand. Il préparait des boxeurs pour des championnats d’Europe et du monde, tels Johane Beauséjour, Aurélien Devogue, Karima Akrour, Sidney Makouza... Cela m’a donné envie de pratiquer dès l’âge de 6 ans. Mais peu après, j’ai eu un doute quand j’ai vu mes copines faire de la danse ou de la gymnastique. Cette incertitude a duré deux ans. Finalement je suis revenue à la boxe et n’ai plus arrêté depuis ».
Emma apprécie l’esprit sportif du club de Courtry où elle s’est fait d’autres amis que ceux du collège Maria-Callas. « On est tous soudés, mais une fois qu’on boxe entre nous, on ne connaît plus personne. C’est la règle. Et c’est peut-être ça qui est le plus dur » reconnaît la jeune fille qui tient cet esprit de combativité de son père. Pascal Roche, 55 ans, est entraineur au club de Courtry depuis sa création, au début des années 80. Il a très vite remarqué le potentiel de la jeune Villevaudéenne. « Au départ, Emma était inscrite dans les cours comme tous les autres. Progressivement, elle a fait preuve d’une grosse motivation. Vu ses excellents résultats, et en plus de ses séances hebdomadaires, elle a bénéficié d’un entraînement personnalisé, allant parfois même jusqu’à boxer tous les jours dans le garage de son père ». Après avoir brillamment remporté les sélections départementales, régionales, puis de zone (quatre en France), l’enjeu logique pour Pascal était d’emmener son élève au championnat de France. Celui-ci s’est tenu à La Motte-Servolex (Savoie) durant le week-end du 18 mai. Quatre concurrentes de la catégorie minime étaient en lice pour le titre, chacune finaliste des quatre zones… dont Emma pour l’Ile-de-France et la Bretagne.
L’arbitre lui interdit d’utiliser ses poings
En compétition, lors des assauts, les coups ne sont pas portés. On parle alors
de « touches » et l’athlète est jugé sur ses qualités techniques et tactiques.
Les jeunes doivent porter des protections pour les dents, les tibias, la
poitrine, un casque et une coquille. « Emma s’est qualifiée sans difficulté
pour la finale en battant deux adversaires. Il y a un système
d’arbitrage et de jugement en BFS qui autorise l’arbitrage des jeunes pour leur
formation. Ce qui a malheureusement été le cas pour la dernière épreuve qui se
joue en trois reprises. Le jeune arbitre a vite été débordé et les
deux concurrentes ont reçu deux avertissements chacune à la fin de la 2e
reprise. Avec le stress et surtout l’interdiction pour Emma d’utiliser ses
poings, technique dans laquelle elle excelle pour enchaîner avec ses jambes, la
Toulousaine Bérénice Claude, nettement plus grande, a finalement remporté
le titre ». Une interdiction pleine de non-sens pour
Pascal car on ne peut pas interdire à un boxeur... d’utiliser ses poings. S’ils
sont revenus déçus, Emma et son coach ne sont pas pour autant abattus. Toujours
aussi motivée, Emma reprendra les gants en septembre, en même temps
que le chemin du collège pour la classe de 3e. « Puisqu’elle
est d’accord, je vais à nouveau l’entraîner pour une saison de compétition,
dont éventuellement le championnat de France 2014. Il faudra travailler
d’autres choses, développer la technique de jambes pour faire des figures plus
variées, les déplacements, les feintes… c’est extrêmement complexe car il y a
beaucoup de choses à travailler dans la savate » conclut Pascal, plutôt
heureux de renouveler le challenge avec sa jeune élève.
Une pépinière de jeunes talents
La section BFS de Courtry compte entre 75 et 100 savateurs, de 6 ans jusqu’aux
vétérans, comme Gérard Jauneau, 58 ans, son président. Les entraînements ont
lieu deux fois par semaine. Le club fonctionne étroitement avec celui de
Clichy-sous-Bois (93) où enseigne également Pascal qui n’a pas plus d’une
dizaine de combats à son actif. Champion Ile-de-France en 1983, vainqueur de la
coupe de Paris en 1984 en première série, il est plus porté sur l’enseignement
que la compétition. Le club peut s’enorgueillir de former de la graine de
champion. A Paris, en février dernier, Ugo Gil, un Courtrysien, remportait à
l’unanimité le titre de champion Ile-de-France dans la catégorie benjamin de
moins de 27 kilos, soit la plus petite catégorie en compétition. L’an dernier,
Ugo avait gagné l’Open international de Paris. Dans ce noble art qu’est la
boxe, la valeur n’attend décidément pas le nombre des années.
S. Moroy
Plus d’infos : www.rpsboxe.com - Le club de BFS sera présent lors du forum des associations, samedi 7 septembre à partir de 14 heures, à l’espace Robert-Jacobsen, Courtry.
Photo:Emma ne se ménage jamais : le lourd sac de frappe reçoit ici un magistral coup de pied fouetté.
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